lundi 20 mars 2017

LA BAIE DE TRITON





Création le 21 mars 2017

En 1875, le capitaine Roudaire faisait un levé topographique de la région des Chotts d’Algérie, dont il a fait état dans un rapport adressé au Ministre de l’Instruction.

Il est normal que cette partie du rapport sur les chotts s’appliquant à la Tunisie soit recensée dans la rubrique « Tunisie » de notre site. Voici le quatrième point  de ce rapport :

2 - EXPOSÉ DES OPÉRATIONS EXÉCUTÉES EN TUNISIE

Le 23 février 1876, le bateau débarque à Sfax. Une petite chaloupe emmène l’expédition qui arrive à Gabès où le Caïd lui offre l’hospitalité dans la Maison du Bey.

Mais la chaleur printanière pointe, et il faut maintenant opérer à pied sur 300 kilomètres, accompagné par le Cheik Belkassem Ben Alizidi, chef de la puissante tribu des Beni Zid, un homme qui se révèle être un véritable ami dont l’expédition ne put se séparer sans une réelle émotion.

Elle apprend ainsi que, suivant la tradition ancienne, les chocs communiquaient avec la Méditerranée par le lit de l’oued Mellah. Les marées sont très accentuées dans le golfe de Gabès. Il faut très rapidement connaître l’altitude du niveau de la plus basse mer. Le niveau du rivage est environ à 20 mètres au-dessus.

Voici quelques témoignages anciens d’auteur arabes :

Abou-Obeid el Bekris : « Dans les chocs, la route n’est indiquée que par des pièces de bois plantées en terre …  si on s’écartait à droite ou à gauche de la route tracée, on s’enfoncerait dans un sol fangeux, qui a la consistance onctueuse du savon. Plus d’une fois, des caravanes et des armées, s’étant imprudemment engagées sur ce sol trompeur, y ont péri sans laisser aucune trace. »

Cheikh Abou-Mohammed el Tidjani (XIVème siècle) : « Si quelque homme vient à s’enfoncer dans le lac, les parties du terrain qui ont cédé se rapprochent aussitôt et la surface redevient ce qu’elle était avant l’accident … Par malheur un des chameaux d’une caravane s’écarta du bon chemin ; tous les autres le suivirent, et rien au mon de ne fut plus prompt que la rapidité avec la quelle la terre s’amollit et engloutit les mille chameaux, plus le terrain redevint ce qu’il était auparavant comme si les mille bêtes de charge qui y avaient disparu n’avaient jamais existé. »

Tous les voyageurs musulmans ont confirmé par des aventures analogues la dangerosité du terrain.

Le capitaine Roudaire ajoute son « grain de sel » : « Notre guide, que je suis immédiatement, s’arrête à chaque instant, interroge l’horizon, cherche à deviner la route, et fait parfois des à-droite ou des à-gauche que rien ne motive en apparence. Le danger est extrême, et il me l’explique : lavée et en partie dissoute par la couche d’eau qui la recouvre, la croûte de sel peut à chaque instant s’effondrer sous nos pas. »

Dans les parties centrales, la croûte saline subit par grand vent de fortes oscillations … et un soir, les piques des tentes ont été arrachés, laissant jaillir des sources d’eau salée, mais limpide !

Le capitaine Roudaire termine ce chapitre par la comparaison avec la situation des lacs Amers par rapport à la Méditerranée : le niveau moyen de ce bassin diffère peu du niveau moyen de la Méditerranée. Les choses pourraient ainsi se passer dans la « mer intérieure ».






3 - IDENTITÉ DES BASSINS DES CHOTTS ET DE LA BAIE DE TRITON

Les habitants pensent très généralement que les eaux de la mer occupaient les bassins des chotts à une époque qu’ils estiment antérieur à la naissance du Prophète.

Hérodote (-456 avant J.-C.), dans le livre IV de son « Histoire » raconte que Jason fut poussé par la tempête sur les côtes de Libye, et qu’il se trouva dans les bas-fonds de la baie de Triton avant de découvrir la terre. Un triton lui montra le moyen de sortir de ce passage dangereux.

Après Hérodote vient Sylax, auteur du « Peuple de la Méditerranée » : « Vers l’intérieur des terres se trouve le grand golfe de  Triton. L’entrée du lac est étroite, Ses bords sont habités par les peuples de Libye. »

Pompinius Melas écrit en l’an 43 : « Au-delà du golfe de la Syrte est le grand lac de Triton … On assure qu’à une certaine distance du rivage il y a des campagnes stériles où l’on trouve des arêtes de poisson, des coquillages, des ancres qui prouvent que la mer s’étendait autrefois jusqu’à dans ces lieux ».

Ptolémée parle du fleuve Gir, mais le mot berbère signifie « bassin hydrographique ».

Donc, dans toutes les traditions, on a le souvenir lointain de ce lac de Triton. Un notable, Sidi Hafnaoui raconte à un voyageur français déguisé en arabe et s’exprimant de même : « Il suffit que les Français se mettent à la tête du projet de creusement du seuil pour que j’ai l’entière confiance dans sa réussite, car ils sont très forts, et ceux qui ont pu percer l’isthme de Suez peuvent parfaitement inonder nos chotts en établissant entre eux et la Méditerranée un passage qui a du certainement exister autrefois. Notre pays n’aura qu’à y gagner si ce projet aboutit. »

D’autres affirment qu’on a trouvé dans un chott un navire qui ressemble à une galère antique. Ses débris ont été mis en pièces pour faire du bois à brûler.

Texte recueilli dans la Grande Mosquée de Nefta :

Louange à Dieu !

Zaafran fut puissante en son temps. Son roi, car elle avait un roi, était brave et il descendit son royaume jusqu’au bord du Maroc.
La mer baignait les remparts de cette ville. Aujourd’hui, la mer s’est retirée, et il est resté une grande surface recouverte de sel. La ville de Zaafran exista longtemps, très longtemps, et tomba en ruine.
 »

D’après le capitaine Roudaire, il existe encore au sud du Nifraoua une oasis qui porte le nom de Zaafran et qui aurait été autrefois une ville considérable. Il ajoute que si on ne trouve pas de trace d’animaux marins , c’est que ces vestiges  ont du être enfouis dans les alluvions.

La suite du rapport s'insère dans la rubrique Algérie :


http://dakerscomerle.blogspot.fr/search/label/b%20127%20-%20LA%20MISSION%20DES%20CHOTTS

Affaire à suivre !