mercredi 17 juin 2020

LA TUNISIE ANTIQUE 2



Capitole de Dougga
Création le 17 juin 2020

Cet article fait suite  à l’article concernant le livre de Hédi Slim et de Nicolas Fauqué « La Tunisie antique de Hannibal à Saint Augustin" :

https://tunisiekersco.blogspot.com/2020/01/la-tunisie-antique.html

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L’ÉPISODE NUMIDE ET LA FIN DE CARTHAGE


Le fait le plus marquant de l’histoire du Maghreb au temps d’Hannibal fut incontestablement l’émergence de royaumes berbères, qui allaient s’effacer peu à peu devant la conquête romaine.

La dernière phase de la deuxième guerre punique fut marquée par le débarquement de Scipion en Afrique et par l’alliance qu’il conclut avec Massinissa. En 202, celui-ci apporta une contribution décisive à la victoire de Rome sur Carthage, à Zama.

Massinissa fut tout au long de son règne l’un des principaux fournisseurs de blé de Rome et de la Grèce. En contrepartie de ses exportations, la Numidie importait du monde grec, et surtout d’Italie, des céramiques, des produits de luxe et du vin, mais aussi des connaissances architecturales. Des marchands italiens, grecs, égyptiens fréquentèrent assidument les villes du royaume.

Les tribus errantes se transformèrent en communautés agricoles, qui devenaient des propriétaires mais aussi des contribuables. La capitale, Cirta (Constantine) dépassa les 100 000 habitants. Massinissa fut divinisé après sa mort.


La déesse Africa
La vie religieuse se caractérisa par la diversité. Mais il y eut aussi la tendance de regrouper les divinités. Une mention particulière pour la déesse Africa.

Les relations se tendirent entre Massinissa et Carthage qui se décida à lui faire la guerre. Rome intervint aussi bien pour contrer les ambitions de Massinissa que celles des Carthaginois. Caton, l’ambassadeur romain fut impressionné par le redressement  économique de Carthage. On lui doit la fameuse phrase : « Delenda est Carthago ». En fait il s’intéressait plus à la surpuissance de l’allié de Rome.

La guerre de siège dura trois ans. Après deux années d’échec, le commandement de l’armée romaine fut confié à Scipion Émilien qui fit le blocus de Carthage. Aux combats de rue succéda un gigantesque incendie. Mais la civilisation carthaginoise ne fut pas détruite pour autant. Les autochtones adoptèrent l’alphabet et la langue phénicienne … jusqu’à l’arabisation du pays.

LA PÉRIODE ROMAINE - LE CADRE HISTORIQUE


L'année -146 constitua un tournant dans l'histoire ancienne de la Tunisie : elle marqua la chute et la destruction de Carthage, qui, des siècles durant, avait joué un rôle de premier plan dans la vie politique, économique et culturelle du monde méditerranéen.

Dès la mort de Massinissa, en -148, les Romains firent en sorte que son héritage fût partagé entre trois de ses fils. Le territoire carthaginois fut déclaré "domaine public de l'État romain", et gouverné par un proconsul.

Cette province revint au premier plan des préoccupations romaines dans la lutte entre Pompée et César. Celui-ci, une fois victorieux, en fit profiter ses amis, et y rançonna ses ennemis.

Auguste, qui pratiquait la politique de romanisation de César, établit de nouveaux colons, en les installant sur les riches terres à blé. S'ensuivit une nouvelle ère de prospérité favorisée par une période de paix de plus de deux siècles, certes au détriment des nomades et de la transhumance : les tribus berbères pratiquèrent une guerilla que Rome confina.

La légion Augusta, gauloise à ses débuts, devint de plus en plus africaine dès l'époque d'Hadrien. Contre les incursions nomades, la frontière (le "limès") fut gardé par une ligne de défense, le "fossatum africae". 

https://dakerscomerle.blogspot.com/2017/02/le-fossatum-africae.html

L'Africa (le nouveau nom de la Tunisie) fut l'une des provinces la plus romanisée de l'Occident romain. Mais les guerres multipliaient les besoins du trésor impérial. Et la crise du troisième siècle conduisit l'Empire au bord de la catastrophe.

Des troubles sporadiques amenèrent des réformes. Mais parallèlement à ces événements, le christianisme s'implanta à Rome, puis en Africa. Les persécutions de Dioclétien furent intenses, mais échouèrent. Par l'édit de Milan de 312, Constantin proclama la liberté du culte et  restitua aux chrétiens les biens qui leur avaient été confisqués. 

Le donatisme, né de l'intransigeance vis à  vis de ceux qui s'étaient soumis à Dioclétien, s'opposa au christianisme. Au début du Vème siècle, le christianisme l'emporta, avec le concours de la forte personnalité de Saint Augustin.


L'ESSOR ÉCONOMIQUE, SOCIAL ET POLITIQUE

 La Tunisie, patrie du plus célèbre des agronomes, Magon, eut une réputation presque légendaire, en pratiquant une politique axée sur l'eau : barrages, terrasses, canaux. Les Romains y imposèrent une monoculture du blé, en abandonnant la culture de l'olivier et de la vigne pour ne pas concurrencer l'Italie.

Mais sous l'influence des empereurs libéraux (espagnols et africains), la culture de l'olivier connut un essor considérable, car l'huile servait aussi à s'éclairer. À l'agriculture, il faut ajouter l'artisanat de la céramique et du marbre.


  • De nombreux ports furent créés. Des bateaux furent achetés pour exporter la production. Cette prospérité économique exceptionnelle favorisa l'ascension d'élites sociales, qui allaient être appelées à jouer un rôle politique de premier plan au sein de l'Empire.

  • Dougga
  •  L'ESSOR DES CITÉS ET DE LA VIE URBAINE
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  • À l'apogée de l'Empire, la Tunisie ne comportait pas moins de deux cents cités, sur les cinq cents que comptait l'ensemble du Maghreb antique. Après la conquête romaine, le souci de sécurité s'atténua au profit des commodités et des avantages qu'offraient les sites.

  •  Le forum joua un rôle fondamental dans la vie urbaine à l'époque romaine. Il était le lieu où battait le cœur de la ville, son centre religieux, politique, juridique, économique, social et en même temps espace de loisirs. Les dimensions du forum et le faste de ses monuments étaient fonction de l'importance de la cité. Le forum de Carthage était le plus vaste de tous (13 000 mètres carrés). 

  • Les spectacles et les loisirs étaient très importants pour distraire le peuple des revendications politiques. Une trentaine de théâtres sont visibles en Tunisie. Il y avait même à Carthage un odéon pour les conférences, les concerts et les lectures publiques. Et, bien sûr, l'amphithéâtre d'El Djem, le seul du monde romain à être construit en pierres de taille et non en briques, pour les courses de chevaux et les jeux du cirque.

  • L'eau a toujours été une préoccupation majeure en Tunisie. À l'époque romaine, elle prit une ampleur exceptionnelle par suite de l'adoption d'un modèle urbain qui impliquait l'utilisation d'énormes quantités d'eau. Aqueducs, thermes, puits et citernes. Le plus important ouvrage d'art d'Afrique était l'aqueduc de Carthage.

  • Maison à Bulla Regia

  • Le schéma classique de la grande demeure romano-africaine est celui d'une habitation fermée sur l'extérieur, mais ouverte sur un espace intérieur.

  • LA VIE ARTISTIQUE ET INTELLECTUELLE

  • La mosaïque : la conquête romaine ne fut suivie d'aucune rupture sur le plan des techniques de la mosaïque.

  • https://www.youtube.com/watch?v=ADd01pM2hA0&feature=youtu.be
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    Mosaïque végérale
  • Dès la première moitié du IIème siècle, une période de recherche et d'expériences s'instaura. Une école "africaine" se tourna vers la riche tradition hellenistique, en particulier les mosaïques d'inspiration végétale.

  • Tête de méduse
  • La peinture, le stuc et le marbre : En ce qui concerne la peinture, les supports se sont souvent abîmés. La sculpture  avait deux tendances : l'officielle et la populaire, qui comprenaient beaucoup de statues funéraires votives. 

  • LA FIN DE L'ANTIQUITÉ

  • L'Empire d'Occident se désagrégeait sous la pression des invasions barbares. Les Vandales s'emparèrent de Carthage en 439. Les Alains, d'origine perse, les Goths et les Suèves, d'origine germanique s'y joignirent. Mais leurs persécutions ne furent ni générales, ni systématiques. Le mode de vie des élites vandales ne différait pas de celui des classes dirigeantes de l'époque romaine.

  • L'empereur Justinien entreprit ensuite de réorganiser en profondeur le pays : rétablissement de l'unité religieuse, restitution des biens confisqués, réseau de forteresses. Mais la reconquête byzantine ne suffit pas à faire revivre l'ère de l'Empire romain. Épuisée, l'Afrique byzantine n'opposa qu'une faible résistance aux conquérants arabes, éblouis par le fabuleux butin que leur procurèrent leurs premiers raids.

  •  CONCLUSION ; L'OUVERTURE ET L'ÉPANOUISSEMENT

  • La Tunisie fut un carrefour où convergèrent les influences des plus grandes civilisations du passé. Elle en profita pleinement. Elle n'accepta des civilisations étrangères que des apports devenus universels, ou qui pouvaient être assimilés par ses propres traditions. Sous sa fascinante  diversité, l'unité de la Tunisie antique demeura profonde.