jeudi 18 décembre 2014

LA COLONNE LECLERC 2





Création le 18 décembre 2014

Les chefs de guerre sont comme le chef d'un orchestre. Ils doivent être bons. Si les musiciens sont bons, c'est la victoire. Voici deux exemples atypiques  qui ont contribué à la création de la "Deuxième DB" ; il y en a bien d'autres.



LIEUTENANT ABEL TOMMY-MARTIN

Dans un numéro de "Collection Uniformes", voici l'histoire d'un des premiers combattants de la France Libre.



Ainé de 12 enfants, Abel Tommy-Martin est né en 1914 à Blangy (Calvados). Il fait ses études en Tunisie, puis devient élève à Sainte Geneviève à Versailles. Il sort de Saint-Cyr en qualité de sous-lieutenant et est affecté au régiment d'infanterie coloniale du Maroc. Il exerce très vite la fonction de commandant de compagnie. En 1939, il est affecté au régiment du Tchad.

Bon dessinateur, Abel Tommy-Martin devient le topographe de Leclerc : c'est lui qui va dresser les cartes des routes d'approche et les plans des objectifs militaires. Le 31 décembre 1940, un vol de reconnaissance est effectué en Blenheim sur l'oasis de Koufra : les photos aériennes seront la base du travail du lieutenant Tommy-Martin.



Koufra est considéré par les Britanniques comme un objectif militaire puissant et imprenable. Mais Leclerc veut une victoire symbolique, il croit en la valeur militaire des colonnes de véhicules mobiles. Tommy-Martin fait partie de la patrouille n°1 de reconnaissance de Koufra. Il fait prisonnier le radio télégraphiste italien et rapporte des documents et des cartes dont il fera des croquis très précis qui serviront à renseigner le commandement en vue de l'attaque à laquelle il participe.

De juillet 1941 à janvier 1942, Tommy-Martin est nommé officiellement "topographe et navigateur" de la colonne Leclerc. Il rapporte des expéditions de reconnaissance une quantité très importante de photos et de croquis qui serviront pour les opérations du Fezzan. 


Le général de Gaulle le cite à l'ordre du corps d'Armée : "Tommy-Martin Abel, lieutenant, a fait preuve à la tête d'un détachement d'attaque des plus belles qualités de bravoure et de sang-froid. A contrôlé la navigation d'une patrouille motorisée avec une précision qui ne s'est jamais démentie sous de nombreuses attaques aériennes."



Suit une période en arrière du front, où, toujours en compagnie de ses tirailleurs sénégalais, il effectue de nombreuses expéditions à pied et en véhicule dans le désert et les montagnes du Tchad. Il recueille des aviateurs anglais et américains égarés dans le désert.



Puis il participe à la campagne d'Italie, débarque dans le golfe de Saint Tropez. Il rapporte à des membres de sa famille que partout les tirailleurs sénégalais sont bien accueillis et que chaque fois qu'il y a un coup dur à donner, les Américains laissent passer les Français devant eux !


 Il est blessé. Malgré les soins, son état de santé se dégrade. Il décède, comme son frère Laurent, comme son cousin Guy, pour la France. En 1975, dans une lettre à la famille Tommy-Martin décrit son ancien subordonné : "Je conserve le souvenir d'un beau garçon, fin et distingué, réservé mais enthousiaste et ardent, habile topographe et dessinateur".

Il fut parmi les tout premiers Français Libres, acteur et témoin d'une fantastique épopée qui mènera les hommes de Leclerc des confins du Tchad au nid d'aigle de Berchtesgaden, à travers le désert libyen, tous unis par le serment de Koufra.




LIEUTENANT JACQUES ZERMATI

Issu d'une grande famille juive de Sétif, son ancêtre paternel est devenu Français par le Senatus Consulte de 1865. Jacques est mobilisé en 1940. Il est blessé, fait prisonnier, s'évade, revient à Sétif. Il y est torturé par la police de Vichy, puis part pour Alger faire de la résistance. Il contribue au succès du débarquement anglo-américain à Alger en faisant prisonnier le préfet d'Alger dans son lit ! Remobilisé, en tant que Juif, il est affecté à un camp de pionniers.

Étant "officier de jour", il s'introduit, la nuit tombée dans le bureau du commandant du camp, et récupère plusieurs documents confidentiels, en particulier celui-ci :



Note de service en date du 15 novembre 1942 :
 1 - Les mesures d'alerte générales devront comporter l'appel des Israélites.
2 - Ils seront affectés à des unités de travailleurs sans dénomination spéciale.
3 - Les volontaires seront affectés à des unités combattantes sous réserve que la proportion d'Israélites de ces unités ne puisse dépasser le cinquième de l'effectif.

Signé : Le général de l'armée GIRAUD, commandant en chef des forces terrestres et aériennes.

Ou celui-ci concernant les membres des sociétés secrètes et les Israélites :

En ce qui concerne les Israélites :
Cette catégorie sera normalement affectée dans les unités spéciales de travailleurs ou de pionniers ... sous réserve :


5 - Affectation des Juifs français et africains - le personnel admis dans les unités combattantes sera affecté à des formations ne comprenant pas de musulmans. Ces formations devront comprendre une proportion normale de ces Juifs.

6 - Juifs étrangers et apatrides - ces catégories de Juifs seront admis à souscrire des engagements à la Légion Étrangère. Exceptionnellement, ils pourront être admis dans les Corps francs.

7 - Service de santé : il pourra être fait appel à des professionnels du corps médical dans la mesure du besoin. Le personnel Juif du service de santé devra être en nombre réduit (maximum 3%) et il conviendra d'éviter qu'il demeure groupé.

Le camp de pionnier auquel Jacques Zermati était affecté était en fait un camp de prisonniers ! Il organise donc des filières d'exfiltration nocturne vers les centres de recrutement des Forces Françaises à travers la Tunisie, en faisant passer les convois par le sud algérien. Des milliers de volontaires viendront grossier les effectifs de la Deuxième DB.

Quant à Jacques Zermati, il partira en Angleterre dans les SAS (Special Air Service). Il sera parachuté en France à l'intérieur des lignes allemandes pour des actions de sabotage ...