jeudi 16 février 2023

OUVRIERS TUNISIENS

Création le 17 février 2023

Le journal des Voyages de 1912 procure une vision des pays avant le bouleversement de la première guerre mondiale. Par exemple sur les industries artisanales diverses en Tunisie …

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Les artisans tunisiens, dont plusieurs sont de véritables artistes, suffisent à vêtir et à meubler la population, depuis le « meskin » (homme de peine) jusqu’au puissant caïd et au riche seigneur, même si la population fait un abus d’armoires à glace, et d’étoffes venant de France.


Les tailleurs sont aussi des brodeurs ; ce double métier exige donc beaucoup de goût et d’adresse. Les étoffes ont été tressées à Tunis, et dans les tentes des nomades du sud, où l’on travaille la laine des moutons à  grosses queues. Ils taillent la culotte bouffante, la "djebba", ample robe, qui évoque la tunique antique, et enfin le burnous, qui se prête aux attitudes nobles, et dont le capuchon est soutaché d’étroits galons de soie.

En voyant le nombre d’Arabes qui marchent nu-pieds, on pourrait croire à l’absence de cordonniers. Il n’en est rien : les « belraji » sont en pleine prospérité. La chaussure d’homme la plus usitée est la « belra », sorte d’escarpin sans talon, ce qui permet de se déchausser facilement partout où le sol est recouvert de nattes sur lesquelles on peut s’étendre. Jadis, seuls les nobles pouvaient porter des chaussures rouges, et le peuple préférait le cuir jaune. Beaucoup de femmes sont nu-pieds; pour aller d’une pièce à l’autre, elles introduisent leurs pieds dans des « kobkabs », sorte de sabot ne gardant que la semelle et le talon ; le bois est l’abricotier, le figuier, le noyer …

Pour satisfaire au besoin de couleurs éclatantes, les Arabes peignent et décorent leurs meubles. C’est presque toujours un fond vert pomme ou or, sur lequel des roses rondes s’épanouissent à côté d’oiseaux, ou de poissons fantastiques. L’Arabe peint aussi des poteries, avec une grande sûreté de goût.

Quand on traverse le souk du cuivre, on est assourdi par le tintamarre que font les ouvriers en martelant le métal, admirables plats ou vulgaires chaudrons. Toutes ces industries luttent encore contre la camelote importée d’Europe.

Sellier